
Le public a une image essentiellement agricole du Jura. Or on oublie souvent que le canton a été l’une des régions les plus industrialisées de Suisse. Ainsi, en 1939, la population active dans l’industrie et l’artisanat dans l’ensemble des sept districts du Jura bernois est de 53,4 %, soit un taux bien plus élevé que la moyenne suisse de l’époque (43,5 %).
L’industrie de la pierre fine est caractéristique de l’Ajoie. Le district a connu des dizaines d’entreprises actives dans ce secteur. L’activité se caractérise d’une part par la présence d’une grande entreprise, celle de la famille Theurillat, et d’autre part par de petits ateliers à domicile.

Le fondateur de la dynastie Theurillat est Augustin-Joseph (1803-1877), horloger à Rebévelier. L’un des fils d’Augustin Joseph, Augustin (1840-1901), commence ses activités dans un petit atelier en ville de Porrentruy; il travaille probablement dans le sertissage de pierres d’horlogerie – à savoir l’action de fixer les pierres dans le mouvement d’une montre.

L’entreprise va profiter du réveil de plusieurs communes ajoulotes qui offrent à la location de petites usines qu’elles ont construites pour dynamiser l’industrie locale. Cette stratégie permet le développement de petites structures. On trouve ainsi des fabriques dans presque chaque village, alors qu’habituellement, l’industrie se trouve dans les faubourgs des villes. Les frères Theurillat loue une usine à la commune de Courtemaîche, qui occupe au plus fort de son activité près de 120 personnes. A Porrentruy, l’usine s’agrandit, mais les locaux restent insuffisants.

Le 11 août 1907 l’assemblée communale de Vendlincourt vote une participation financière à la construction d’une fabrique de pierres d’horlogerie. L’entreprise Theurillat & Cie, à la veille de la Première Guerre mondiale, investit le nouveau bâtiment, sis à proximité de la gare. Elle en fera de même en 1919 à Cornol.



La petite succursale des Theurillat à Vendlincourt occupe environ une trentaine de pierristes, essentiellement des femmes, et cela jusqu’au mitan des 1960. La disparition de la société en 1967 coïncide avec l’apparition du laser et de la montre à quartz. Le bâtiment connaît alors diverses affectations. Une bonneterie y prend notamment ses quartiers durant plusieurs années. Avant son abandon définitif dans les années 2000, la fabrique sert de garage automobile et de ventes de pièces détachées. La fabrique porte aujourd’hui encore quelques stigmates de cette ultime fonction.



Crédits
Texte: Des usines dans les vallées, Alain Cortat, éditions Alphil, décembre 2014
Photos:(archives): Histoire de Vendlincourt, Simon Vatré, non publié, 1947
Photos:(extraits journaux): JURA 13.8.1907 PAYS 3.8.1907 PAYS 15.8.1907